L'EFFET LEURRE
400 000 distributeurs 340 dollars
48 appâts 38 heures
En ville
Une file à un distributeur de billets. Une femme introduit sa carte, retire 340 dollars et jette des regards anxieux autour d'elle. Soudain elle s'enfuit, poursuivie par un homme en costume noir, cravate et lunettes noires. On la voit alternativement en direct et par le biais de caméras de surveillance. Elle fuit, bousculant des passants poursuivie par l'homme qui fait de même. Puis celui-ci tire trois coups de feu et la jeune femme s'effondre en lâchant les billets qu'elle tenait à la main. L'homme s'enfuit en grimpant à l'arrière d'un fourgon.
Calsci, bureau de Larry.
Larry classe des chemises, assis à son bureau sur lequel on voit une pile de dossiers. Charlie s'approche de lui une chemise à la main.
Charlie : Bon, alors, le mélangeur hyper fréquence à rétro diffusion ?
Larry : Refusé à coup sûr !
Charlie s'assoit sur le bureau et pose sa chemise sur une pile.
Charlie : Refusé... (Il prend un autre dossier) Que penserais-tu du calcul ternaire ?
Larry, faisant une grimace dégoûtée : Naah !
Charlie : Nah ! (Il prend un autre dossier) La fabrication nanométrique avec écarteur sacrificiel.
Larry (plongé dans les dossiers) : Ah non !
Charlie : Attends, tu rigoles ! La fabrication nanométrique !
Larry hoche la tête en signe de dénégation et fait la moue. Alan et Amita arrivent à leur tour.
Alan : Non hé, faut pas rigoler avec la fabrication nanométrique !
Charlie pousse un soupir.
Amita : Vous allez toujours à la commission d'étude des projets ?
Elle s'assoit.
Charlie : Ouais, mais comme on a suspendu mon accréditation de la NSA, tout ce que je peux faire c'est... regarder ! A ce train-là, mon prochain article s'intitulera : notre ami le triangle.
Amita : John Conway et Steven Sigure ont déjà écrit un excellent bouquin sur le sujet.
Charlie : Ah mince !
Larry : Vous seriez surprise si vous saviez le nombre de nos travaux qui recoupent des recherches gouvernementales top secrètes. L'université a même limité son accès au super ordinateur.
Charlie opine de la tête, résigné. Alan le regarde, bras croisés.
Alan : Charlie, est-ce que ça ferait trop paternel si je te disais qu'une fois passé un délai de principe, tu pourrais envisager de jouer stratégie hein ? Fais semblant de t'excuser.
Charlie : Si c'était aussi simple que ça ! Je dois présenter une requête pour qu'ils me rendent mon accréditation. Et la première étape c'est un entretien, demain, avec un agent du F.B.I. : ils appellent ça un officier de sécurité.
Amita : Mais enfin, ce n'est pas comme si tu ne connaissais personne au F.B.I.
Charlie : Je ne veux pas impliquer Don. Et puis les faits sont de mon côté : je n'ai envoyé au Pakistan aucune information qui menace la sécurité nationale.
Alan (s'approchant et se penchant sur le bureau) : Tu sais, quand on a à faire au gouvernement, ça peut être utile d'avoir autre chose de son côté que de simples faits.
Charlie opine de la tête.
Rues de Los Angeles, lieu de l'agression.
Le cadavre de la femme est recouvert d'un drap blanc. Nikki se tient accroupie auprès d'elle. Don s'approche et elle se relève.
Don : Alors, on a quoi Nikki ?
Nikki : Alice Demère, 33 ans, informaticienne dans une petite société de courtage rue Figuéroa (Don se penche et soulève le drap pour examiner la victime). Elle a pris deux balles, calibre 38.
On entend la conversation de plusieurs agents sur les lieux qui interrogent les témoins.
Don (regardant Nikki) : Bon ! Les gars du labo sont déjà passés ?
Nikki : Non, mais je m'y connais en impact.
Elle relit ses notes tandis que Don rabaisse le drap.
Nikki : J'ai une description du suspect : homme de race blanche, la trentaine, costume foncé, lunettes de soleil, parti à bord d'une camionnette de livraison genre fleuriste ou boulanger, enfin... dans ce goût-là.
Don (hochant la tête) : Sûrement volée !
Nikki : Ou alors c'est un gang de malfrats de la boulangerie ! Le distributeur est par là !
Elle montre la direction du doigt. Ils rejoignent le distributeur auprès duquel Colby pianote sur un ordinateur portable.
Nikki (à Don qui marche à côté d'elle) : Quand je pense qu'il y a des quartiers ou quand un billet de 20 tombe par terre il y reste ! (Sourire amusé de Don).
Don : T'as quelque chose Colby ?
Colby (approchant et montrant l'ordinateur à Don) : Ouais, c'est la meilleure photo qu'on ait du tueur.
Il fait défiler les images que regardent Don et Nikki.
Colby : Il s'est déplacé deux fois dans la file.
Don : Pour éviter les caméra.
Colby : Mmmh
David (arrivant par derrière et montrant une photo où on distingue parfaitement l'homme) : Il a été prudent dans la file d'attente mais pas pendant sa course poursuite. Il y a un parking juste là (il montre du pouce), toutes ses caméras sont pointées vers la rue.
Don (observant la photo) : Tu l'as donnée aux flics ?
David : Ouais, y'a dix minutes.
Nikki : Je sais que je suis le p'tit nouveau mais... qu'est-ce qu'on vient faire ici ? C'est plutôt à la police de s'occuper de ce genre d'affaire !
Don : Cette femme a été enlevée il y a trente-six heures avec demande au mari de veiller à avoir trois cents dollars sur son compte.
David : Ca s'appelle des kidnappings express. J'en ai vu à l'époque où j'étais en garnison à Tel-Aviv. Les victimes sont embarquées dans la rue, on les retient un ou deux jours, on les oblige à vider leurs comptes en banque et on les relâche. En général les familles ont peur (son téléphone se met à sonner, il le prend et décroche en finissant sa phrase) et les sommes sont si petites qu'elles payent d'abord et elles ne nous le signalent qu'après !
Il part pour répondre à son appel.
Colby : La cinquième femme en sept semaines : toutes employées avec de modestes revenus : ils les frappent, les violent et les balancent dans la rue. C'est la première qu'ils tuent.
Don : C'est la première qui s'enfuit !
Colby opine de la tête.
Nikki : On s'enfuit devant quelqu'un qui a un flingue quand on sait qu'il va s'en servir.
David (raccrochant son téléphone, et s'adressant à Nikki) : Hé, p'tit nouveau ! T'es avec moi !
Nikki (avec un geste désabusé, le suivant) : J'ai comme l'impression que ça va me rester.
Colby et Don retournent au distributeur, David et Nikki partent dans la direction opposée.
Rues de Los Angeles, plus loin.
David arrive en enfilant ses gants, escorté par un policier. On voit brûler un véhicule au premier plan.
Policier : La camionnette a été déposée par un homme blanc, on n'a pas son signalement. Une berline quatre portes grises est venue le prendre.
Plusieurs hommes récoltent des indices sur les lieux. Ils s'approchent d'un corps étendu sous un drap blanc.
David : Où étaient les témoins ?
Policier (pointant le doigt) : Là-bas, sur le pont.
Nikki : D'où l'absence de description.
David s'accroupit pour examiner la victime. C'est l'homme qui poursuivait la femme, le visage brûlé. Nikki a un rictus d'horreur.
Policier : Les pompiers ont trouvé des traces de cocktail Molotov dans la cabine.
Nikki : Encore une question de p'tit nouveau !
David : A quel genre de méchants on a à faire s'ils tuent leurs complices quand ils dérapent ? Il la regarde. Elle a l'air ébranlée. Vue sur les pompiers qui éteignent l'incendie.
NUMB3RS
Siège du F.B.I.
Des photos du malfrat tué s'affichent à l'écran ainsi que son casier judiciaire que regardent Colby et Nikki
Nikki : Joey Herman, pensionnaire régulier des résidences pénitentiaires californiennes sorti de la prison de Chino en mai après trois ans pour braquage d'une bourse à la joaillerie. Un braqueur chevronné, mais pas une lumière !
Colby : Ca expliquerait qu'il ait pris une balle dans la tête.
Nikki (affichant quatre portraits robots à l'écran) : Il correspond au portrait N°3 qu'on a fait d'après la description des autres victimes.
Colby : Reste à trouver les trois autres.
David (arrivant derrière eux avec un dossier volumineux) : Ceux qui se sont chargés de lui connaissaient leur boulot. Le labo dit que l'intérieur du véhicule a été lavé et javellisé avant d'être flambé. Ce qui veut dire que si on trouve des preuves scientifiques, elles ne pourront nous servir qu'APRES les avoir attrapés.
Colby : En cinq vols ces gars ont ramassé en tout et pour tout moins de vingt mille dollars. Cinq enlèvements, deux homicides, ça fait beaucoup de risques pour pas grand-chose !
David, assis sur le bureau derrière eux, opine de la tête.
Nikki : Dans le quartier hispanique, on vous tue pour une bière !
Colby : Ouais, mais on n'est pas dans le quartier est. C'est pas du vol à l'arrachée de toxico : leur mode opératoire indique que ce sont des pros !
David : Les kidnappings express valent le coup de l'autre côté de la frontière, dans les pays en voie de développement où on fait beaucoup de choses avec peu d'argent. Mais on ne passe pas d'un butin en pierres précieuses à l'extorsion de quelques malheureux dollars sans une bonne raison. Y'a un truc qui nous échappe là !
Colby : Ouais, avec ces gars là y'a toujours un ex-compagnon de cellule ou un associé dans les parages.
David : Ce qui veut dire de longues heures de recherches fastidieuses !
Colby : Exact ! (Regardant David, l'air malicieux) Je me demande qui va écoper de la corvée ?
Nikki a un regard entendu en les lorgnant du coin de l'œil.
David (moqueur) : Ouh... C'est le genre de truc qui se décide à l'ancienneté non ? Qu'est-ce que t'en dis ?
Colby (opinant vigoureusement de la tête) : Mmm !
Nikki (grimaçant) : Vous savez que ça va devenir lassant !
David éclate de rire.
Colby : Ouais, mais seulement pour toi !
Ils partent en la laissant. Elle se lève avec un soupir de résignation.
Maison des Eppes.
A la télévison, lors des informations, on passe un reportage sur l'agression. Charlie est devant, la télécommande à la main.
Reporter : A l'heure où je vous parle le F.B.I. enquête toujours...
Don entre dans la maison Charlie se retourne.
Reporter : ... sur les circonstances du meurtre.
Don : Salut !
Charlie : Salut ! Ca tombe bien que tu sois là. (Il arrête le son) Je regardais les infos et je suis tombé là-dessus. C'est bien toi que j'ai vu ?
Don : Ouais.
Il accroche sa veste et pose son arme dans le tiroir.
Charlie : Ecoute, je sais que tu ne peux pas en parler mais... (Il frappe l'accoudoir du fauteuil)
Don : On n'en sait pas plus que ça.
Charlie : D'accord... Non, parce que tu sais, j'ai réfléchi (Il se tourne vers Don qui est en train d'examiner le courrier sur la table de l'entrée.) et je me suis dit comme ça qu'une analyse point par point utilisant les mathématiques, comme celle que j'ai peaufiné pour vous... Il suffirait d'entrer les données dans le logiciel et il ferait le reste.
Don (le regardant) : Ouais, c'est déjà en cours.
Il regarde à nouveau le courrier tandis que Charlie se retourne vers la télé.
Charlie : Ah oui ?
Don : Ouais.
Charlie : Bien.
Don laisse tomber les enveloppes qu'il tenait à la main, semble hésiter un instant puis s'approche de son frère.
Don : Ils ne nous ont pas laissé beaucoup d'indices. On va devoir enquêter dans la rue.
Charlie (se retournant vers lui) : Ca veut dire que vous attendez qu'il y ait une autre victime ?
Don : Ou on les piège. On peut mettre dix, vingt ou même trente femmes dans la rue (Il s'appuie à la cloison) en espérant qu'ils en enlèvent une.
Charlie : Dans le marketing, il y a une technique qui s'appelle « l'effet leurre ». (Il se lève et s'approche de son frère). C'est, comme quand tu as acheté la montre que tu as au poignet. [Début d'une mise en image de la théorie] Tu avais le choix entre une montre plus chère, de haute technologie, étanche jusqu'à mille mètres avec verre anti-rayures et tachymètre et une autre montre moins chère qui ne faisait que donner l'heure. Et tu as fait ton choix en comparant leurs fonctions et leur prix de vente. Mais admettons qu'une troisième montre soit mise sur le marché, plus chère encore mais sans tachymètre. La plupart des clients choisiront celle qui est chère, mais avec tachymètre, même si au départ ils voulaient la moins chère. Mais en fait la troisième montre est un leurre, [Fin de la mise en image de la théorie] elle n'est là que pour inciter à acheter le produit le plus cher...
Don : Mais...
Charlie : ... ça s'appelle : la dominance asymétrique.
Don (allant s'asseoir) : Comment on...
Charlie : Vous ne pouvez pas mettre des appâts au hasard en espérant qu'on les enlève. Vous devez créer des conditions qui les rendrons plus désirables : la fréquence des patrouilles de polices ou les moyens de surveillance, ce que vous feriez normalement. Sauf que là, ils seraient ciblés, grâce à une série d'algorithmes...
Don (l'interrompant) : Est-ce qu'Amita et Larry pourraient le faire ?
Charlie (semblant dépité) : Ouais... Bien sûr ils sont... C'est vrai ils sont tous les deux très... très compétents mais je... Tout ce que je voulais dire c'est que je pourrai affiner le procédé et leur donner de nouvelles pistes de recherches.
Don hoche la tête et se relève, l'air ennuyé. Il lui tourne le dos et se dirige vers la cuisine.
Charlie : Dis euh... (Don se retourne vers lui) Qu'est-ce que tu sais sur cet officier de sécurité du F.B.I. : Mac Gowan ?
Don (fronçant les sourcils) : Karl ?
Charlie : Oui, je crois que c'est Karl Mac Gowan.
Don (faisant la moue) : Il est dur, mais juste.
Charlie : Plutôt dur ou plutôt juste ?
Don (soupirant et ne trouvant pas ses mots, paraissant inquiet) : T'inquiète pas, ça va aller !
Charlie (peu convaincu et inquiet lui aussi) : C'est pas une réponse.
Don hoche la tête tandis que son téléphone sonne. Il frappe la main sur sa cuisse en signe d'impuissance et décroche.
Don : Oui, Eppes.
Charlie soupire et n'insiste pas.
Siège du F.B.I.
Nikki (à Don assis sur la table) : On a envoyé un bulletin d'alerte dans cinq comtés pour toute femme disparue correspondant au profil de nos victimes. J'ai commencé par aujourd'hui parce que je serais étonnée qu'ils en garde plus d'une à la fois.
Don boit son café tout en fixant l'écran. Nikki tapote sur son clavier d'ordinateur et un permis de conduire s'affiche sur l'écran.
Nikki : Il en est sorti : Janet Gerber, chef de service dans une mutuelle à Hollywood. A quitté son bureau à 16 h 30 déclarée disparue à 20 h 00.
Don (fronçant les sourcils) : Ca n'a pas traîné !
Nikki : Les infos ont rendu les gens nerveux. (Pointant le doigt vers l'écran) Elle correspond exactement à notre profil. Une femme, trente-cinq ans, revenus moyens.
Don (se levant) : D'accord mais...
Nikki : Ah ah ! Je t'aurais pas fait revenir aussi tard s'il n'y avait pas eu autre chose !
Elle pianote à nouveau sur son clavier et défile un film de vidéo surveillance sur lequel on voit la jeune femme se dirigeant vers son véhicule dans un parking souterrain. Un van s'interpose entre elle et la caméra et lorsqu'il redémarre, la femme a disparu.
Don : Ils l'ont enlevée !
Nikki : Ils ont procédé comme pour les autres. Ils vont larguer le van et prendre une camionnette de livraison.
Don : Hé oui, c'est plus maniable et surtout moins voyant.
Nikki (s'enflammant) : Je pense à une conférence de presse : mettre son visage à la une de tous les journaux. Ils prennent peur et ils la relâchent.
Don : Non, au contraire : ça les pousserait à aller jusqu'au bout.
Nikki lui jette un regard de reproche mais ne réplique pas.
Domicile de Janet Gerber.
Sa compagne fouille dans ses papiers, surveillée par David et Colby.
Femme : Je cherche quoi exactement ?
Colby : Relevé de banque, reçu de cartes de crédit, tout ce qui permettrait de la localiser.
Femme : Elle ne rentre jamais après 6 h ½ . Quand j'ai appelé la police, je voulais me rassurer. Et eux ils ont dit qu'ils la tueraient si je vous contactais ; mais je l'avais déjà fait.
David : Ils vous disent ce qui est dans leur intérêt à eux, pas dans celui de Janet. Vous avez bien fait.
Femme (se mettant à pleurer) : Janet est une fille très prudente. Elle ne s'aventure pas dans des coins dangereux, elle fait attention à tout ce qui se passe autour d'elle. (Elle essaie de se dominer) S'ils peuvent débarquer et vous enlever dans la rue comme ça, sans raison (elle replace sa mèche derrière ses oreilles) : comment on se protège d'une chose pareille ?
Les deux agents échangent un regard, sans savoir quoi répondre.
Femme : L'autre femme, celle de la télé, ils l'ont tuée ! Et celles d'avant, ils les ont toutes tabassées, ils les ont violées...
Colby : Croyez-moi, nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour vous ramener Janet saine et sauve.
La jeune femme hoche la tête sans répondre et se remet à pleurer en regardant une photo d'elle et de sa compagne.
Siège du F.B.I.
Don entre dans la pièce où se trouvent Amita et Larry.
Don : Bonsoir, merci de vous être déplacés.
Amita (se détournant de l'ordinateur) : Oui, on essaie d'accélérer la procédure. La dominance asymétrique assez simple.
Larry (roulant sur sa chaise jusqu'à elle) : C'est vrai mais les applications de Charlie, en revanche, sont très compliquées.
Amita : Oui.
Don : Vous savez, on est en plein milieu d'un enlèvement. Alors on arrivera peut-être à rien, mais en tout cas... merci.
Il sort de la pièce, suivi par Larry.
Larry : Vous oubliez que la planète connue sous le nom de Ro 1 Conkry E a été découverte par accident alors qu'on essayait de modéliser les mouvements de son étoile principale.
Don (ne comprenant pas où il veut en venir) : Quoi ?
Larry : Aucun travail n'est jamais perdu.
Il se refocalise sur son écran.
Don : Tant mieux ! (Il s'éloigne rapidement) Nikki, où on en est ?
Nikki est devant un autre terminal et de grands écrans.
Nikki : Le réseau national nous a donné l'accès à SPIDER, un programme de traçage de retraits aux distributeurs pour éviter les fraudes. (Elle montre l'écran) La quasi-totalité des distributeurs du pays sont reliés au système. (On voit le logo de SPIDER, une toile d'araignée, puis une carte des Etats-Unis dont les différents points sont reliés entre eux.) Il indique en temps réel les opérations effectuées sur les quatre cent mille appareils à travers le pays. (Elle se remet à pianoter sur le clavier) Et regarde ça : il donne également la quantité de liquide disponible dans chaque machine à chaque moment. Comme ça ils savent quand les réapprovisionner.
Don (très attentif) : Bon, et alors ?
Nikki : A chaque fois que tu utilises une carte de retrait, SPIDER contacte la banque pour vérifier que tu as l'argent sur ton compte. Et on a déjà eu trois vérifications sur la carte de Janet Gerber. (Elle fait apparaître trois localisations sur un plan suivies de trois images satellites des endroits localisés). Là, là, et là ! La dernière il y a deux heures.
Don : T'as envoyé quelqu'un ?
Nikki : Oui, j'ai prévenu la police. Et Colby et David sillonnent le secteur.
Don (fronçant les sourcils) : On a récupéré des photos ?
Nikki affiche les photos des caméras des distributeurs sur lesquelles on voit Janet Gerber, visiblement très éprouvées qui retire du liquide.
Nikki : On a lancé un programme de reconnaissance faciale pour les autres clients.
Don s'approche de l'écran et scrute une partie de la photo.
Don : C'est quoi ça ? (Il isole le détail). Juste là ! (Zoom sur ce détail).
Nikki : C'est à la limite du champ de la caméra.
On voit une silhouette et une main.
Don : C'est notre homme ! C'est lui !
A ce moment-là, une ligne se met à clignoter sur l'écran où apparaissent les transactions par carte. Nikki pointe son doigt dessus.
Nikki : On a un signal : quelqu'un utilise l'une de ses cartes !
Don se rue hors de la pièce.
En voiture, dans Los Angeles
David est au volant.
Don (dans l'émetteur de Colby) : ...au coin de la cinquième et d'Alaméda.
David accélère et tourne brusquement. Colby se cramponne à la fois à la portière et au plafond de la voiture.
Colby : En un seul morceau de préférence !
David : Ecoute, tu connais la règle ! Si t'es pas content tu prends le volant !
Ils arrivent devant un centre commercial où luit une enseigne : SALERO. Ils approchent lentement du distributeur de billets. Où un homme est en train d'effectuer un retrait.
Colby : Trop tard ?
David : A moins que ce soit lui.
Colby regarde alors les portraits robots qu'il tient sur ses genoux.
Colby : Hmm... Il ne ressemble à aucun des portraits robots.
David (continuant de rouler lentement le long du distributeur) : Ouais ? Parce que ça arrive ?
Colby soupire. L'homme s'éloigne du distributeur tandis que la voiture passe à sa hauteur. Il s'approche d'un van.
David : Ca en revanche, ça correspond à la description du van des ravisseurs.
Colby sort rapidement de la voiture et l'homme s'enfuit en lâchant le sac qu'il tenait. Colby entame la poursuite à pieds tandis que David manœuvre rapidement et repart en direction opposée pour tenter de barrer la route au suspect. L'homme se jette dans une fosse alors que la voiture de David passe au-dessus de lui, puis il continue à fuir. Il débouche sur la route où il est renversé par un 4 x 4.
Une voix : Hé ! Attention !
David se rue hors de sa voiture en brandissant sa carte.
David : F.B.I. ! Restez dans votre véhicule!
Automobiliste : Oui d'accord ! Je ne l'avais pas vu !
David s'accroupit auprès de l'homme tandis que Colby le rejoint.
David : Mort ! Tué sur le coup !
Colby : Personne dans le van.
David (se relevant) : Ca en fait au moins deux dans la nature.
Colby : Et ils ont toujours Janet Gerber.
Siège du F.B.I.
Don et Nikki interroge l'une des victimes. La femme est à un bout de la table, Nikki à côté d'elle, sur le côté, dos à la cloison vitrée, Don du même côté mais presque à l'autre bout de la table.
Mme Mouney : Je vous ai déjà dit tout ce dont je me souvenais.
Nikki : Il y a eu de nouveaux événements Madame Mouney. Ils ont enlevé une autre femme.
Mme Mouney : Je suis désolée. (Un temps) J'ai tout fait pour oublier ce qui s'est passé.
Sans parler, Don fait glisser vers Nikki deux cartons portant chacun six portraits de suspects. Elle les présente à la victime.
Mme Mouney (pointant l'un des visages) : Celui-là : il sortait du van avec moi quand j'allais retirer l'argent. Il avait une arme mais il ne... il ne participait pas au reste.
Nikki regarde Don.
Don : Reconnaissez-vous quelqu'un d'autre ?
Elle regarde plus attentivement le deuxième carton.
Mme Mouney : Non.
Don (haussant les sourcils) : Vous êtes sûre ?
Mme Mouney (le fixant) : J'ai passé trente-huit heures aux mains de ces... Oui, j'en suis sûre !
Don opine de la tête en se mordant les lèvres.
Nikki : Dans votre déposition, vous avez parlé de quatre hommes, dont un qu'ils voyaient sur des parkings.
Mme Mouney : Oui, il venait, leur parlait deux minutes et il repartait. Quelques heures après ils téléphonaient à quelqu'un : j'avais l'impression que c'était à lui.
Don (très attentif) : De quoi est-ce qu'ils parlaient ?
Mme Mouney : De la prochaine banque où ils allaient me conduire peut-être. (bouleversée soudain) Je crois, je n'en sais rien, je ne me souviens plus ! J'ai passé presque tout le temps allongée sur le sol. (Au bord des larmes) Cette femme, celle qu'ils retiennent en ce moment...
Nikki : Nous allons tout faire pour la retrouver saine et sauve !
Mme Mouney hoche la tête en signe d'approbation en retenant difficilement ses larmes.
Siège du F.B.I., un peu plus tard.
La photographie du malfrat identifié par Mme Mouney est affichée sur le tableau. Don et David sont assis sur la table en face.
Nikki : Zak Tolling. Il purgeait une peine pour détention de drogue au moment des trois premiers enlèvements.
Don (marchant de long en large) : D'accord. Donc ils tuent Herman pour son cafouillage, ensuite ils prennent Tolling.
Nikki : Le van avait été nettoyé à fond. On suppose que Tolling avait été chargé de s'en débarrasser. (Don continue à marcher, visiblement très concentré) Au lieu de ça, il décide d'aller faire ses courses. Il empoche une des cartes de crédit de Janet Gerber histoire de se faire un peu d'argent de poche au passage.
David : Ils ont pas choisi le haut du panier avec Tolling : vols de voitures, petits cambriolages...
Don : On n'a aucune activité sur ses autres cartes ?
Nikki : Non, dans aucun distributeur. Si Tolling ne revient pas, ils vont devenir nerveux.
Don : Non, sinon ils auraient fermé boutique après la mort d'Herman.
Nikki : Herman n'avait pas participé aux viols. C'était peut-être lui le chef de meute. Et ils se sont retournés contre lui.
Don a saisi la télécommande et les quatre portrait robots qu'il regarde quelques secondes très attentivement. Il hoche la tête et pointe soudain la main droite vers le quatrième portrait.
Don (se retournant vers ses collaborateurs) : C'est celui-là le chef ! Il n'est pas dans le van avec eux, il leur dit où aller, dans quel distributeur faire les retraits...
David : Il se fiche de ce que ses gars font subir à ces femmes mais il veille à effacer scrupuleusement toutes les preuves. (Don opine vigoureusement de la tête.) Il fait appeler les victimes depuis des téléphones jetables et il tue son maillon faible.
Nikki : Pourquoi un tel professionnel prend-il autant de risques pour des sommes aussi ridicules ? Ils n'atteignent même pas le plafond de retrait autorisé. Ils ne tirent que des sommes bizarres : 420 $, 350...
Don semble réfléchir profondément.
David (hésitant) : Pour tout ce qui concerne les chiffres, on a un spécialiste.
Don : Non, pas question !
David : J'ai rien dit !
Don, indécis, regarde les quatre portraits tout en frappant sa main gauche de la télécommande.
Siège du F.B.I.
Charlie frappe à la porte d'un bureau. L'agent à l'intérieur lui fait signe d'entrer.
Charlie : Agent Mc Gowan ?
Mac Gowan (plongé dans ses dossiers) : Entrez et asseyez-vous professeur.
Charlie ferme la porte, s'assoit et attend que son interlocuteur parle. Celui-ci continue d'étudier le dossier qui est devant lui. Et de prendre des notes.
Charlie (mal à l'aise) : Je...
Mac Gowan (levant un index impérieux) : Attendez ! Une seconde...
Il continue d'étudier son dossier. Comprenant la manœuvre Charlie sourit puis ricane doucement. Mc Gowan lève la tête.
Mac Gowan : Vous n'êtes pas venu avec un avocat ?
Charlie : J'ignorais que j'avais besoin d'en avoir un. Toutes les poursuites ont été abandonnées.
Mac Gowan : Pour éviter d'être pointés du doigt. Je sais...
Il s'adosse à son fauteuil.
Charlie : Pointés du doigt ?
Mac Gowan : Un consultant du F.B.I. qui envoie des informations classées secrètes et potentiellement dangereuses à un groupe étranger est considéré comme suspect. Je suppose qu'un titulaire de plusieurs doctorats est à même de mesurer à quel point c'est embarrassant.
Charlie : Ces informations permettaient un meilleur rendement agricole...
Mac Gowan : Embarrassant pour le F.B.I., pour notre gouvernement, pour votre frère...
Charlie (interloqué) : Mon frère ?
Mac Gowan : Il a probablement commis un suicide professionnel à long terme en vous prenant comme consultant. (Charlie se décompose) Mais ça le regarde.
Charlie : Je vois... J'ai l'impression que vous vous êtes déjà forgé votre opinion.
Mac Gowan : Les directives du F.B.I. sont claires. Elles m'interdisent formellement de faire intervenir mes opinions personnelles pour attribuer les habilitations de sécurité. Et il ne serait pas professionnel de ma part d'ignorer les consignes de mon employeur.
Les deux hommes se regardent droit dans les yeux.
Charlie : J'ai donné beaucoup de mon temps et de mon travail au F.B.I.
Mac Gowan : Mais ce n'est pas ce qui vous amène ici. Vous êtes ici parce que sans votre habilitation vous n'êtes plus grassement payé pour des recherches gouvernementales.
Charlie : Que vous disiez cela prouve que vous ne savez pas grand-chose sur moi !
Mac Gowan : Pour l'instant. Mais ça viendra. Votre vie n'aura bientôt plus aucun secret pour moi. Je vais vous poser des questions sur des choses dont vous considérez que je n'ai pas à me mêler. Et dans la mesure où votre avenir professionnel ne tient qu'à un fil extrêmement fin, il vous incombera de répondre à chacune d'elle avec précision et honnêteté.
Charlie semble réfléchir profondément et se lève.
Charlie : Je vais en parler à mon avocat.
Il sort.
Un terrain vague de Los Angeles
Des policiers s'affairent dans un périmètre de sécurité délimité par les bandes jaunes. Colby s'approche de Nikki, accroupie près du corps de Janet Gerber, déjà enveloppée dans une housse mortuaire dont seul son visage ensanglanté émerge. Elle tient à la main un sac plastique dans lequel il y a des cartes de crédit.
Colby : Salut !
Il s'accroupit près de Nikki.
Nikki : Salut ! Ce sont deux S.D.F. qui l'ont trouvée.
Colby : On n'a pas réussi à la sauver.
Il baisse la tête.
Nikki : Une balle à l'arrière de la tête. Aucun signe de violences : pas de trace de viol.
Colby : Ils ont voulu se débarrasser d'elle en vitesse.
Nikki : Ils deviennent imprudents.
Colby : Et plus violents.
Nikki (se relevant, suivie de Colby) : Viens voir ça ! (Elle montre des traces de pneus) D'après les gars du labo celles-ci et celles-ci sont récentes.
Colby : Deux types de traces. Ils larguent un van, en en ayant déjà un en remplacement.
Nikki : Ils vont continuer.
Colby soupire.
Siège du F.B.I.
Larry et Amita font un rapport devant Don avachi dans un fauteuil, les pieds sur la table, David assis dans un fauteuil derrière lui à sa droite et Nikki assise sur la table juste derrière son chef..
Larry : En utilisant la dominance asymétrique, nous avons cerné un ensemble de considérations fondées sur les critères des enlèvements précédents. Et nous avons entré toutes ces données dans un programme surpuissant d'analyse régressive.
Nikki (complètement dépassée, se tournant vers David) : Quoi ?
David : Oui, ça va te faire ça les premiers mois. Mais après tu t'y feras...
Amita : C'est ce qu'on appelle la mathématique du leurre ou de l'appât. C'est une façon de créer les meilleures conditions pour réussir un enlèvement en pleine rue, grâce à l'emplacement stratégique non seulement de l'appât, mais aussi des postes et des patrouilles de police.
Larry : Nous avons commencé par les patrouilles de police et les limites géographiques supposées de leurs périmètres d'action. Et ensuite nous avons tenu compte de la publicité faite autour des enlèvements et nous avons appliqué tout ces facteurs de façon à pouvoir définir leur zone cible.
Nikki le regarde toujours l'air de ne rien capter du tout !
Larry (déstabilisé par le regard de Nikki) : Hé heu... Cela dit, la plupart des femmes sont devenues plus prudentes maintenant.
Amita (affichant une carte) : Sur cette carte les zones rouges sont les plus propices, les zones oranges sont des cibles secondaires.
Larry (désignant la carte) : Oui, et tout ceci en présupposant que vous appliquiez notre méthode de paramétrage des zones en coupant l'éclairage public afin de créer l'obscurité requise et en déviant la circulation pour isoler certaines rues.
Durant son exposé, Don s'est redressé dans son fauteuil, il se penche en avant, scrutant la carte.
Don : Je veux bien, mais là il y a au moins... cinquante zones !
Larry : Oh non ! Il n'y en a que quarante trois ! (geste d'impuissance de Don).
Nikki : Vous en avez une préférée ?
Larry : Une préférée ? Non. Mais ce que je peux vous dire c'est que, quelles que soient les zones sélectionnées, j'y inclurai (Amita agrandit la zone dont il parle) l'angle du boulevard Wildshire et Grand Avenue.
David : Un conseil basé sur ?...
Larry (faisant la moue) : Mmmh... Une sorte d'intuition.
Nikki (quittant la pièce suivie par le regard de Don) : Ce qui veut dire que c'est moi qui serai là-bas.
Don (fronçant les sourcils) : Attends... Qui a dit que TOI tu irais ?
Nikki : Il te faut quarante-trois appâts Don ! Il y en a beaucoup d'autres dans le service qui sont des agents femmes autour de la trentaine ?
David rit discrètement et échange un regard entendu avec son chef qui soupire avec amusement en signe d'abdication et se lève.
Maison des Eppes.
Tout en vidant ses poches de veste sur la table de l'entrée, Charlie se plaint à son père.
Charlie : On en voit souvent dans le milieu universitaire : un petit bureaucrate englué depuis vingt ans dans des tâches absurdes et répétitives qui cherche la petite bête.
Alan est assis dans son fauteuil, les lunettes à la main et écoute attentivement son fils.
Alan : Ouais... Et c'est quoi au juste la petite bête ?
Charlie (accrochant sa veste) : N'importe quelle technique d'investigation innovante ou un point de vue alternatif, j'en sais rien moi et je veux pas le savoir !
Il se ouvre sa serviette.
Alan : Tu as tort, c'est important que tu le saches ! Et ton avocat, qu'est-ce qu'il en dit ?
Charlie (retirant des dossiers de sa serviette) : La même chose que Mc Gowan : que j'ai pas le choix, que je dois coopérer ! (Tout en parlant il ouvre un bloc-notes et le consulte.) Il va suivre la procédure mais... sa décision est déjà prise !
Alan : Même si c'est le cas, tu dois te battre comme si rien n'était joué.
Charlie (plaquant rageusement ses dossiers sur la table) : Tu sais ce qu'il a dit ? (Il s'approche rapidement de son père) Tu sais ce qu'il a dit ? Il a clairement laissé entendre que j'avais ruiné la carrière de Don !
Alan : Qu'est-ce que ton frère pense de ça ?
Charlie (se penchant sur une liasse de papiers sur la table près de son père) : Je lui en ai pas encore parlé. Et puis tu le connais : il va pousser un grognement et changer de sujet !
Il se passe la main sur le menton et se laisse tomber dans le fauteuil face à son père en soupirant.
Charlie : En envoyant ces recherches au Pakistan, j'étais parfaitement que ça pourrait affecter mon avenir. A aucun moment je n'ai pensé à la carrière de Don (Son père le regarde pensivement). J'ai pas pensé à lui !
Siège du F.B.I.
Don passe devant l'arsenal où Nikki se prépare.
Don : Salut !
Nikki (brandissant un micro dissimulé dans une boucle d'oreille) : Ca change tout d'avoir un budget fédéral ouais. Les transmetteurs de la police sont presque aussi gros que des briques.
Elle met la boucle à son oreille.
Don (entrant dans la pièce) : Hé, t'es chez les pros maintenant !
Elle rit.
Don : Tu sais, ces histoires de nouveau ça fait partie...
Nikki : ... du fait d'être le nouveau ?
Don : Ouais. C'est quand ils arrêtent d'être sur ton dos qu'il faut commencer à t'inquiéter.
Nikki (tout en soupirant et mettant la deuxième boucle d'oreille) : Ca ne me dérange pas.
Don : Aha. A ma sortie de Quantico, ils m'ont envoyé à Détroit. (Il rit) D'abord ils m'ont fait répondre au téléphone pendant trois semaines, qui m'ont paru trois mois, et un jour... il leur manquait du monde, je devais exécuter un mandat d'arrestation à l'encontre d'une bande de malfaiteurs à moto ! T'imagines ? Des foutus teigneux ! (Pendant qu'il raconte, Nikki continue de se préparer.) J'étais volontaire pour entrer le premier.
Nikki : Et qu'est-ce que ça a donné ? (Elle glisse une arme dans son holster de cheville).
Don : Je me suis pris la raclée de ma vie et je suis retourné répondre au téléphone !
Nikki (le regardant) : Je suppose que tu veux me faire passer un message ?
Don : Tu devrais faire une longue carrière avec nous, alors te sens pas obligée de faire tes preuves dès maintenant.
Elle sourit.
Nikki : A ma sortie de l'école de police (Don s'appuie à la cloison pour l'écouter), un génie de l'administration a décidé de m'envoyer dans la cité Nikerson pour piéger des dealers. Il s'est dit : « Une nouvelle tête, pas encore des manières de flic, la parfaite infiltrée ! ». (Don fait la moue) Et peu importe si, à l'époque, j'étais incapable de menotter quelqu'un. Le cinquième jour, un certain Lo Tuan Rivers m'enfonce un 22 dans la joue en essayant de m'enfoncer autre chose ailleurs. Après un congé maladie, une évaluation psychologique et un document où je promettais de ne pas poursuivre la ville pour stupidité (Don rit avec elle), ils m'ont offert de m'affecter où je voulais. Le jour suivant j'étais dans la cité Nikerson pour piéger des dealers.
Don : Je suppose que tu essayes de me faire passer un message...
Nikki : Je sais que dans un premier temps je vais répondre au téléphone et vérifier des immatriculations. Et s'il y a besoin de quelqu'un sur le terrain, je suis partante.
Don (souriant) : Très bien, c'est noté.
Il quitte la pièce.
Siège du F.B.I. en alternance avec la rue
Dans une salle un groupe d'agents est rassemblé autour de la grande table, chacun devant un ordinateur portable et muni d'écouteurs. Don dirige le groupe en jouant avec un élastique et en mâchant du chewing-gum. Les agents discutent entre eux. Nikki sert d'appât, suivie par David et Colby dans une voiture.
Voix de David dans le haut-parleur : Attention à toute l'équipe, l'appât numéro 5 fait un nouveau passage.
Nikki sort d'un bâtiment.
Nikki : Fffh ! Et on refait un tour de manège !
Colby conduit la voiture avec David en passager et ils la suivent de près.
Nikki : Ca va les gars ! Donnez-moi un peu de champ ! Je vous trouve un peu trop collants.
Colby : Ca fait plaisir ! Sympa le nouveau !
David rit.
David : Tu sais comment c'est.
Colby : Mouais... Mais ce que je sais surtout c'est qu'elle devrait un peu moins la ramener !
David : C'est sûr ! Un peu comme le gars qu'a failli me faire tuer à peine arrivé chez nous, en jouant les durs face à un gang de motards vietnamiens.
Nikki marche dans la rue. David décroche son émetteur.
David : L'appât numéro 5 se dirige vers le sud, direction Grand Avenue.
Au siège du F.B.I., les agents notent ces indications pour pouvoir suivre les déplacements en temps réel.
Don : Billy, dis à la patrouille d'Hollywood de reculer d'un pâté de maison. June, dis au 14 de ralentir au prochain passage.
June : D'accord. Equipe 14 ...
Une voix : Numéro 1 au fond du bâtiment.
Nikki, continuant de marcher sur le trottoir s'aperçoit soudain qu'elle est suivie par un van.
Nikki : Ca y est, je crois qu'on a une touche !
Colby et David arrivent derrière le van. David saisit le numéro sur son ordinateur.
David : L'immatriculation correspond à un cabriolet.
Colby : Alors, qu'est-ce que t'en dis ?
Le van tourne à droite.
David : J'en dis qu'on prend à droite !
Colby obtempère et ils doublent le van qui s'est arrêté dans la rue qu'il vient de prendre.
Au moment où Nikki arrive à hauteur du van, un homme arrive derrière elle et la saisit à la gorge tandis qu'un autre ouvre le van de l'intérieur.
Agresseur 1 : N'essaie pas de crier ! Monte gentiment dans le van si tu veux vivre !
Tandis que le premier agresseur la pousse, le second l'attire à l'intérieur du véhicule. Arrêtés plusieurs mètres devant le van, David et Colby ont assisté à l'enlèvement.
David : Ca a mordu ! On les suit!
L'un des hommes se met au volant tandis que l'autre reste avec Nikki et le van démarre. Il passe devant la voiture des fédéraux qui se mettent à le suivre.
Siège du F.B.I en alternance avec la rue
Don (jouant toujours avec son élastique) : Le numéro cinq est activé ! Numéro cinq activé ! Que toutes les unités se dirigent à l'angle de Broadway et la Neuvième prêtes à intervenir. Envoyez l'image et le son !
Sur l'écran s'affiche une vue du van.
Voix de l'agresseur 1 : Regarde par terre
Nikki (semblant apeurée) : Je vais rester tranquille !
Agresseur 1 : Ferme la !
Nikki : Prenez ce que vous voulez ! Ah ! (Elle halète pour faire croire à la panique) Je suis désolée, c'est parce que j'ai peur. (L'homme vide son sac sur le plancher du van.) Vous êtes deux et vous êtes armés !
Agresseur 1 : T'es sourde ou quoi !!
Don (levant l'index et le majeur) : Vous avez entendu ? Ils sont deux avec elle. Surveillance cinq : quel est son code de détresse ?
David (toujours dans la voiture suiveuse) : Mexico.
Colby (indigné) : Tu lui as donné notre code de détresse ?!!
Le van s'arrête, Don voit l'image en direct.
Voix de David : Le van se range sur le côté.
A l'intérieur du van, Nikki, à terre se redresse. L'un des hommes sort et téléphone observé par les deux agents du F.B.I. dans la voiture. Colby passe en revue les portrait robots.
Colby : Le un et le deux.
David (à Don) : On a une confirmation visuelle des suspects numéros un et deux.
Une voix : L'unité 8 est à seulement deux rues. L'unité 22 est à huit rues.
Les agents notent les indications données. Don regard l'écran.
Don : Pour l'instant on ne bouge pas.
Agresseur 2 (au téléphone, lisant la fausse carte d'identité de Nikki) : Lisa Hillman, 2-5-2-7 Tourounga Avenue. 8-1-8-5-5-5-0-1-8-9. 4-60 3-50 2-80 4-80 1-20
David et Colby regarde toujours attentivement le van arrêté. L'homme remonte dans le véhicule, reprend le volant et démarre.
David : Ils repartent.
Don : O.K. Vous décrochez et vous prenez une parallèle !
David : C'est fait.
Voix de Don dans le récepteur de Colby et David : Unité 8 vous les prenez sur Grand Avenue.
Voix au siège du F.B.I. : Unité 8 on a repris le sujet.
Au siège du F.B.I. un téléphone se met à sonner. Il s'agit de la ligne qui est censée être celle du domicile de Lisa Hillman. Don s'assoit auprès du poste.
Don : Attention silence !
Une voix de femme : Silence s'il vous plaît !
Don (décrochant) : Allo ?
Voix : Nous avons votre femme : Lisa Hillman, numéro de permis de conduire 7-2-5-3-3-8-4-9 (Plan sur le bas du visage d'un homme en train de fumer.) Ne faites pas de bêtises et on vous la rendra d'ici une quinzaine d'heures.
Don (feignant l'affolement) : Est-ce que... Laissez-moi lui parler !
Voix : Ce qui serait une bêtise, ce serait d'appeler la police ou de faire opposition sur ses cartes de crédit. En revanche vous veillerez à ce qu'il y ait, sur chacun de ses comptes, cinq mille dollars.
Don : Cinq mille dollars ? Mais je n'ai pas cet argent ! Je vous en prie, laissez-moi lui parler !
L'homme raccroche avant qu'il n'ait fini sa phrase.
Une technicienne affiche alors à l'écran une zone de localisation de l'émetteur de l'appel.
Technicienne : Téléphone jetable, rayon 3 km, Los Angeles ouest.
Don : Bon, envoyez les trois unités les plus proches dans cette direction ! Unité cinq c'est bien reçu ?
David : Affirmatif. En espérant que ça nous mène au chef de meute !
Don (passant la main sur son front) : Oui, sauf si Nikki sonne le repli.
Le van continue à circuler, suivi de la voiture de David et Colby. Puis il s'arrête.
Agresseur 1 : Vous allez sortir et retirer 460 dollars. (A l'énoncé de la somme, Don tique) Ensuite vous reviendrez dans le van. Vous n'adresserez la parole à personne.
Don (pensant à voix haute) : 460 ?
Agresseur 1 : Vous ne regarderez personne, vous garderez les yeux baissés. Faites oui avec la tête !
Nikki obtempère.
Agresseur 1 : Debout !
Comme elle semble hésiter il la tire par la veste :
Agresseur 1 : DEBOUT !
Don réfléchit profondément. Nikki sort du van et va retirer la somme demandée, toujours surveillée par ses coéquipiers. Puis elle retourne au van.
Calsci, bureau de Larry
Charlie (entrant dans la pièce) : Vous reformulez le potentiel de Kinawa ?
Amita : L'exponentielle donne le rang fini d'interaction.
Charlie : Résultat, on n'est pas plus avancés.
Larry : Charles ! Même si nous apprécions ton aide, tu ne peux pas...
Charlie : Allez ! La physique des astro-particules liées au bozon de Igze est l'un de mes rares plaisirs ces temps-ci.
Il se met à écrire sur son bloc note.
Larry (se prenant la tête dans les mains) : Je suis tellement fatigué ! J'veux juste rentrer !
A ce moment-là un portable sonne.
Larry (regardant autour de lui) : Ah ! Ca c'est le mien.
Charlie : Je croyais que tu n'avais plus de portable.
Larry (soulevant ses dossiers pour trouver le portable) : Je m'en étais débarrassé (il regarde autour de lui), mais ton frère ... m'en a donné un autre d'office !
Charlie hoche la tête, un peu contrarié. Larry soulève une liasse de feuille et attrape le portable qu'il brandit triomphalement.
Larry : Ah ! (Il décroche. Charlie, le visage fermé, semble plongé dans ses calculs). Oui Don ? (Charlie lève la tête). J'arrive tout de suite !
Il raccroche. Prends sa sacoche et s'apprête à quitter la pièce sans un mot.
Charlie : C'est l'affaire des enlèvements aux distributeurs.
Larry se retourne vers lui et pousse un profond soupir puis se tourne vers Amita.
Larry : A mon avis on va devoir résoudre un problème combinatoire. Tu m'accompagnes ?
Amita : D'accord. (Elle se tourne vers Charlie, hésitante) A moins que tu ne...
Charlie : Non ! Non, vas-y !
Amita se lève et se dirige vers lui.
Amita : Ne m'attends pas.
Elle lui dépose un baiser rapide sur les lèvres et rejoint Larry. Ils quittent la pièce. Charlie les regarde partir et laisse tomber son bloc et son stylo en poussant un profond soupir.
Dans la rue en alternance avec le siège du F.B.I.
Vue sur Colby et David dans leur voiture, sur Don scrutant les écrans de contrôle puis sur Nikki se dirigeant vers un distributeur, accompagnée de l'un de ses ravisseurs.
David (au micro) : Troisième banque, et toujours aucun signe du chef.
Don : D'accord, ne les lâchez pas.
Vue sur la voiture et les deux agents. Nikki est poussée dans le van. Elle soupire et gémit.
Nikki (feignant toujours d'être affolée) : Hé ! Si vous avez internet je peux vous transférer de l'argent.
A ce moment là Larry et Amita entrent dans la salle. Don leur fait signe de rester silencieux.
Agresseur 1 : Assieds-toi !
Nikki : Vous avez un ordinateur portable ? Qu'est-ce que c'est ? SPIDER, c'est un...
Ravisseur 1 : La ferme !
On entend le bruit d'une gifle. Consternation au siège du F.B.I.
Agresseur 1 (frappant sur la paroi du van) : On peut en finir avec elle, qu'on en prenne une autre ?
David : Don, il faut intervenir.
Don (catégorique) : Intervention à MON signal !
Nikki : Pardon, pardon, désolée ! J'ai quinze mille dollars.
Agresseur 1 : T'as quoi ?
Don fronce les sourcils, n'approuvant pas vraiment cette improvisation.
Nikki : J'ai quinze mille dollars de côté. Mon mari n'est pas au courant. Ils sont dans un coffre à mon nom et j'irai vous les chercher dès que la banque ouvrira.
Agresseur 1 : Tu nous mentirais pas juste pour essayer de sauver ta peau ?
Nikki (le regardant droit dans les yeux) : J'pourrai. Mais là c'est la vérité !
L'homme rit et la fixe à nouveau, indécis.
Agresseur 1 : D'accord. Accroche-toi.
Le van repart.
Don : O.K. tout le monde. On laisse filer ! On laisse filer mais on les colle. Vous me renvoyez tout en salle technique.
Un agent : Oui monsieur.
Don sort suivi de Larry et Amita.
Le van continue à circuler, toujours suivi par la voiture de David et Colby. A l'arrière Nikki se tient à la paroi pour ne pas être déséquilibrée.
Siège du F.B.I., salle technique.
Don : SPIDER c'est...
Amita : Un programme de suivi en temps réel des distributeurs.
Don : C'est ça.
Amita : Charlie et moi on a travaillé sur un réseau de neurones distribués, comme tous les informaticiens et les matheux de la fac.
Don : D'après Nikki, on peut le faire tourner sur un portable.
Amita : Exact.
Don : Et puis les sommes sont bizarres. Ils ne tirent pas cent dollars, deux cents dollars. Non, non, c'est quatre cent soixante, trois cent cinquante...
Larry : Oui c'est ça, des montants atypiques mais avec une connaissance spécifique des deux noyaux de la transaction.
Vue sur la carte des Etats-Unis maillées par SPIDER. Larry joint les mains et se tourne vers Amita, il semble avoir compris quelque chose.
Larry : C'est l'effet Hall ! Il procède à une dorure à la feuille. Il a programmé l'application d'un champ magnétique perpendiculaire au courant électrique (il s'emballe au fur et à mesure de son exposé) pour découvrir les différences potentielles... (Don hoche la tête, complètement largué) des deux côtés opposés du conducteur.
Don : Oh oh oh ! Oh là, du calme ! J'ai rien compris !
Larry : Oui, je vous ai perdu ! (A Amita) : Aide-moi, tu veux.
Amita : En connaissant le montant, le distributeur et la banque, il peut voir de quelle façon l'argent circule grâce à SPIDER, (Don hoche la tête pour montrer qu'il suit la démonstration) il essaie de pénétrer plus profondément le programme.
Larry : Pour détourner le flux, je suppose.
Don (comprenant soudain) : Il gère aussi le réapprovisionnement ?
Amita (s'approchant et appuyant sur une touche du clavier pour faire apparaître un nouvel écran) : Tout à fait, tous les quatre ou cinq jours. Quand un distributeur est presque vide, SPIDER envoie un message au camion blindé qui l'approvisionne pour qu'il aille le remplir.
Don : D'accord. Donc, s'il peut s'infiltrer dans le programme il...
Larry : ... il peut organiser la livraison de très grosses sommes d'argent dans les endroits les moins sécurisés du circuit au moment où LUI le décide.
Don : Est-ce qu'on a une chance de remonter jusqu'à lui ?
Larry soupire.
Amita : Ce sera difficile !
Don : Bon, ben alors ne perdez pas de temps, au travail !
Larry se précipite hors de la pièce, suivi d'Amita.
Dans la rue, en alternance avec le siège du F.B.I.
Nikki est en train d'effectuer un retrait à un distributeur.
David : Cinquième et dernière Don. Ils ont atteint le plafond sur toutes ses cartes.
Le van redémarre et les agents le prennent en filature à bonne distance.
Le van roule dans les rues, toujours suivi de la voiture de David et Colby.
Agresseur 1 : Quelle heure tu as ?
Agresseur 2 : Presque quatre heures. On est censés la larguer avant le lever du jour.
Agresseur 1 (regardant Nikki avec une lueur perverse dans le regard) : Ca nous laisse pas beaucoup de temps, hein ma belle ?
Le van s'est arrêté au bout d'une ruelle, David et Colby s'arrêtent plusieurs mètres derrière.
Colby : C'est en train de mal tourner ! ... Don !
Au siège du F.B.I. Don hésite.
Voix de Nikki : La banque ouvre dans quatre heures... Quinze mille dollars... Je vous le jure !
Agresseur 1 : Oh, oui, t'as raison ! (Il commence à déboucler sa ceinture de pantalon) Tu vas jurer, et tu vas même prier !
Nikki se blottit le long de la paroi en soupirant, il s'approche et pointe son arme sur elle. Quand il est assez près pour la toucher, elle saisit l'arme et attaque l'homme.
Agresseur 1 : Oh ! Espèce de...
On entend deux coups de feu provenant de l'intérieur du van
Don : Allez on fonce ! On fonce ! Tout le monde sur le pont !
David et Colby redémarrent pour rejoindre le van. Au moment où ils arrivent, les portes arrières s'ouvrent et Nikki en sort en roulé-boulé. Elle pointe alors l'arme qu'elle a pris à son agresseur sur celui-ci qui tente de se jeter sur elle.
Nikki : F.B.I. ! Vas-y, fais moi plaisir!
L'homme lève les mains. David et Colby se précipitent hors de leur voiture, armes braquées.
David : F.B.I. ! Mettez vos mains en evidence!
Colby : Les mains en l'air !
Un agent : Tout le monde sur le côté !
Des agents arrivent et emmènent les malfaiteurs.
Un agent : Tournez vous !
Un autre : Jambes écartées, mains derrière la tête !
David a rejoint Nikki.
Colby : Elle va bien ?
Nikki (emboîtant le pas à David) : Oui, elle va bien.
Siège du F.B.I., un peu plus tard.
Les portes de l'ascenseur s'ouvrent laissant passer Nikki, un sourire fanfaron sur le visage, suivie de David et Colby. Don, assis à son bureau, tourne la tête vers eux, se lève et vient rapidement à leur rencontre.
Don (à Nikki, sèchement) : C'est quoi le code de détresse ?
Nikki (toujours très à l'aise) : Mexico !
Don (faisant une moue d'incompréhension) : Et alors ?
Nikki (perdant un peu de son assurance) : On n'avait pas le chef et je contrôlais la situation.
Don (se mettant en colère et brandissant la main gauche, doigts tendus) : Il m'a fallu cinq secondes pour te les envoyer ! Ca leur laissait largement le temps de te faire sauter ta petite tête d'agent indiscipliné au moins cinq fois !
Nikki : Patron, j'essayais juste de...
Don (pointant le doigt par-dessus l'épaule de Nikki) : Va te changer et rédige ton rapport ! Quand tu auras fini de l'écrire tu feras du B9-0-4 !
Il lui tourne le dos, la laissant abasourdie. David et Colby qui étaient restés derrière elle passent devant pour rejoindre leur chef.
Colby (compatissant, au passage) : C'est le téléphone.
Voix de Don (qui s'est éloigné) : C'est le seul équipement que tu utiliseras avant un bon moment !
Nikki reste figée au milieu de l'allée alors que ses coéquipiers rejoignent Don. Puis elle va s'asseoir à son bureau.
Maison des Eppes
Charlie, arrive dans la salle à manger où Larry est attablé tandis qu'Alan dessert la table.
Charlie (l'air plutôt déprimé) : Bonjour.
Alan : Ah, trop tard pour le petit déjeuner ! Mais il reste du café...
Charlie (soupirant et introduisant une liasse de feuille dans sa sacoche) : Non. Je dois porter notre programme de cours de mathématiques informatique à Amita.
Alan, arrivé à la porte de la cuisine, se retourne vers lui et le regarde attentivement.
Charlie (s'énervant un peu et se dirigeant vers l'entrée) : Elle doit déjà m'attendre à la fac !
Larry : Sans doute pas. Quand je l'ai quittée à quatre heures du matin, elle était toujours au F.B.I.
Charlie (se tournant vers lui) : Ah oui ? On sait s'il y a eu du nouveau dans l'affaire ?
Larry : Du nouveau oui mais pas de conclusion.
Alan ressort de la cuisine et fixe à nouveau son fils.
Charlie : Dans ce cas je vais le lui déposer là-bas en allant à la fac.
Il sort.
Larry (regardant Alan) : Il est clair que cette situation le déstabilise de plus en plus.
Alan (s'asseyant) : Ah oui. C'est cette histoire d'accréditation. Ce panier contenait plus d'œufs qu'il ne l'imaginait.
Larry : Aucun de nous ne l'avait imaginé. Vous savez, en tant que scientifiques nous prenons nos relations avec le gouvernement pour acquises. Et nous oublions à quel point son financement est vital pour nos recherches.
Alan : Ouais, c'est vrai.
Larry (se redressant, les mains derrière la tête) : Le combat de Charlie n'a absolument rien d'existentiel.
Alan : Ben alors, y'a pas de soucis à se faire. Il est toujours plus performant quand il est dos au mur.
Siège du F.B.I.
Dans une salle, Colby, Don et David, assis sur une table, regardent les écrans sur lesquels s'affichent les photographies des deux agresseurs arrêtés dans la nuit, le portrait robot du chef et toutes les pièces afférentes au dossier (photos des victimes, casiers judiciaires des malfaiteurs...) qui s'affichent tour à tour.
Colby : Deux nouveaux petits malfrats, liens avec des bandes organisées, plusieurs petits délits. Chaney, celui du milieu, à connu Tolling en prison. Ces gars étaient briefés. Ils ont demandé un avocat dès qu'ils ont eu les menottes.
Don : Ils risquent la peine de mort et ils le savent. Dis à Robin qu'on acceptera un accord s'ils nous donnent le chef.
Colby : Elle le sait, mais ça va prendre du temps.
David : On a eu les viols, les enlèvements, et maintenant deux meurtres. Ce gars va être obligé de mettre le feu à toute l'opération.
Don (dubitatif) : Ca... rien n'est moins sûr !
Colby : Quand Hermann tue un otage il le supprime et le remplace. Quand Zak Tolling tombe il met dans le circuit les deux gars qui lui restent.
David : Il change de mode opératoire, accélère les enlèvements et ne prend plus contact que par téléphone.
Don : C'est vrai, il est malin. Mais je ne le vois pas aller aussi loin sans prendre son argent.
Siège du F.B.I., salle technique.
Le réseau SPIDER apparaît sur l'écran. Amita est assise au clavier, entourée de Don, Colby et David, restés debout.
Amita : Il n'y a aucun signe d'intrusion dans le système. Les administrateurs ont changé les mots de passe et ont verrouillé les entrées secrètes. Ca va lui prendre des jours, voire des semaines, pour le pirater.
Don : Il peut être là et observer ?
Amita : Passivement, oui.
David : Donc, le chef de meute voit quand sont réapprovisionnés les distributeurs de la ville.
Charlie fait irruption dans la pièce.
Amita : Et même du pays.
Charlie : Ca donne une liste des braquages possibles de camions blindés.
Don (estomaqué et l'air pas franchement ravi) : Et, mais qu'est-ce que... ?
Charlie : Tout va bien ! J'ai un badge de visiteur : Jimmy m'a fait entrer. (Il tend le dossier à Amita) Ca c'est pour toi. (A David et Colby) Content de vous voir. (A Amita) Tiens.
Amita : Merci.
Charlie : Et SPIDER est un programme géré par un organisme privé et indépendant, donc pas besoin d'accréditation. (Don essaie de parler mais n'y arrive pas) Alors je peux vous dire au premier coup d'œil que ces enlèvements sont un moyen de cartographier le programme en localisant les transactions connues, les entrées secrètes. J'en avais d'ailleurs parlé au programmeur il y a deux ans.
Don (toujours réticent lève la main) : Charlie arrête ! Tu n'as pas le droit, désolé.
Il prend son frère par l'épaule et l'entraîne hors de la salle.
Don (marchant vers la sortie) : Tu n'as pas le droit de faire ça !
Charlie : Mais je peux vous aider. (Ils sortent) Je sais, il y a Mac Gowan, mais qu'il aille se faire voir s'il ne peut pas comprendre ça !
Don : C'est toi qui ne comprends pas la politique de...
Charlie : Oh si ! Je commence ! (sans regarder son frère en face) Vous avez un type qui a enlevé, assassiné et permis des viols. Il est intelligent, il recommencera. A ma place, tu laisserais le règlement t'empêcher de l'arrêter ?
Il regarde son frère droit dans les yeux. Celui-ci hésite, le visage grave, puis soudain il sourit largement et se met à rire.
Charlie : Allez, au boulot.
Ils retournent dans la pièce.
Don : Il va devoir agir vite ! Il va frapper un grand coup d'ici un jour ou deux.
Colby : A condition qu'il puisse réunir une équipe aussi vite.
Don : Il en a peut-être déjà une. Hermann était le seul à être expérimenté.
David : Ca expliquerait qu'il ait utilisé Tolling. Après avoir perdu Hermann, il ne voulait pas risquer de perdre un autre homme compétent.
Colby : Mais déjà, pourquoi risquer de perdre Hermann sur un enlèvement ?
Charlie : C'était sûrement sa version personnelle d'un algorithme d'ordonnancement.
Amita : Les ordinateurs les utilisent pour mettre en balance la longueur ou la difficulté des tâches avec les ressources du système et les organiser en fonction.
[Début d'une mise en image de la théorie.]
Charlie : Il faut savoir que notre chef de meute a des ressources bien définies : des armes, de l'argent, des véhicules, des hommes de main. Parmi ces ressources, certaines peuvent accomplir plusieurs tâches tandis que d'autres n'ont qu'une fonction. Parce que le temps lui est compté il va devoir planifier les tâches afin d'optimiser son efficacité, de sorte que toutes ses ressources soient exploitées au mieux.
[Fin de la mise en image de la théorie.]
Don : D'accord. Conclusion ?
Charlie : Ce qui est intéressant dans les algorithmes d'ordonnancement, c'est qu'on en n'a pas encore trouvé de parfait.
Amita : Il y en a des centaines : la règle de Smith, le zéro deux, le beam search... Chaque programmeur peut en créer un, le tester et lui donner un nom.
Charlie : Et tout comme les méthodes d'un programmeur, les riffs d'un guitariste ou les coups de pinceau d'un peintre, [Nouvelle mise en image de la théorie] un algorithme d'ordonnancement est l'expression d'un processus mental unique. Il ne révèle pas seulement les choix qui ont été faits, il indique aussi les décisions à venir : comment sera joué le prochain accord, quel sera le prochain coup de pinceau. [Fin de la mise en image de la théorie.]
Rues de Los Angeles
Un fourgon est arrêté devant un distributeur. Deux berlines reculent vers lui à grande vitesse.
Voix : C'est le moment, on y va !
Les deux berlines s'arrêtent au niveau du fourgon et des hommes braquent des armes automatiques sur les deux convoyeurs de fonds qui sont à l'extérieur du véhicule.
Un agresseur : Envoyez l'argent !
Un autre : Et pas de gestes brusques !
Les deux convoyeurs sont David et Colby. Un tireur d'élite prend position sur un toit, juste au-dessus de la scène. Don, suivi de plusieurs agents du F.B.I. et d'une unité du SWAT sort alors du bâtiment où ils étaient dissimulés. Tous braquent leurs armes sur les malfaiteurs.
Don : F.B.I. !
Un agent : On ne bouge plus !
Don : Posez vos armes !
Un agent : Pose ton arme !
Un agent : Les mains en l'air !
Un autre : Posez vos armes !
Les malfaiteurs, comprenant qu'ils ont perdu la partie, obtempèrent.
Don se précipite vers le chef de meute, lui arrache sa cagoule et le remet aux mains d'un collègue.
Siège du F.B.I.
Nikki, dépitée voit revenir ses coéquipiers de l'intervention dont elle a été écartée.
David (à Colby) : Pff ! Elle va mal le prendre hein ?
Colby : C'est sûr !
Nikki (se levant en fermant le classeur volumineux qu'elle tenait) : Alors, racontez !
David : Ah ! T'aurais dû voir ça ! Les balles qui sifflaient ! Les voitures qui se retournaient ! (Le téléphone se met à sonner) C'était énorme !
Nikki a un sourire résigné, elle a compris la plaisanterie. Elle décroche le téléphone.
Nikki : F.B.I., Bétancourt. Euh... oui... Ne quittez pas.
Elle reprend son classeur et cherche dedans, sous l'œil à la fois amusé et compatissant de Colby qui échange un regard moqueur avec David. Celui-ci rit tandis que Nikki continue à tourner désespérément les pages à la recherche du numéro de poste du correspondant que veut joindre son interlocuteur. Elle transfère l'appel et se retourne vers ses coéquipiers.
Nikki (découragée) : J'en ai encore pour combien de temps ?
David (soupirant et échangeant un regard avec Colby) : Of !! Le Don d'avant sa thérapie t'aurait laissée croupir ici trois mois, facile. (Nikki est affolée) Mais là c'est le Don d'après sa thérapie alors...
Colby : Oh je dirais : dix semaines, onze maximum.
Nikki hoche la tête, soupire et sourit.
Colby : Allez, trouve un moyen de basculer tes appels sur le standard, on t'emmène boire une bière.
Elle fait tomber son classeur sur le bureau.
Siège du F.B.I., bureau de Mac Gowan.
L'agent est en train d'étudier un dossier. On frappe à la porte qui s'ouvre aussitôt.
Don (entrant dans la pièce) : Salut !
Mac Gowan : Bonsoir Don. Je n'aurais jamais pensé te voir au onzième étage sans que la direction t'y oblige.
Don : Je suis venu te parler de Charlie si ça ne t'embête pas.
Mac Gowan (hostile) : Sans blague ? Je pense qu'il vaudrait mieux attendre l'entretien officiel.
Don : Tu sais, je ne suis pas là pour prendre sa défense. Mais franchement, le travail qu'il accomplit ici...
Mac Gowan (le coupant) : D'autres pourraient le faire. Peut-être pas aussi bien mais... mais de façon plus fiable.
Don (s'approchant du bureau) : Tu sais Karl, ça fait longtemps que tu n'as pas été sur le terrain.
Mac Gowan : Et toi tu y es depuis très longtemps.
Don (inquiet) : Ce qui veut dire ?
Mac Gowan : Ce n'est pas parce qu'il n'y a pas de rapport que je ne suis pas au courant. Des méthodes quelques peu douteuses, une thérapie qu'on a dû t'imposer, l'un de tes agents qui démissionne... (Don se frotte l'oreille) et maintenant cette histoire avec ton frère. (Don le fixe, bouche ouverte, ne sachant que répondre). Il est de mon devoir de savoir ce qui se passe aux étages inférieurs.
Don : J'ai un taux de 85 % de réussite. Voilà ce qui se passe !
Mac Gowan : Et c'est la moindre des choses ! Parce que c'est la méthode Eppes. (Il ricane) Je n'ignore pas que ton frère et toi avez joué au plus fin aujourd'hui, et la semaine dernière ! Mais... les règles c'est bon pour les autres, n'est-ce pas ?
Don reste muet encore quelque instant, fait une moue résigné et a un sourire désabusé.
Don : Bon, écoute... Si tu veux t'en prendre à moi, tu t'en prends à moi ; mais laisse mon frère en dehors de ça, d'accord ?
Mac Gowan : Rien n'est jamais isolé, tout est lié. C'est peut-être ça le problème : que tu ne t'en rendes pas compte.
Don le fixe dans les yeux quelques instants, déglutit et sort sans un mot.
Maison des Eppes.
Vue en plongée. Charlie et Amita sont au lit. Charlie, allongé sur le dos est plongé dans ses pensées. Amita, assise à sa gauche, le regarde.
Charlie : Je pourrai écrire. Tu sais, mon éditeur m'a supplié d'écrire la suite de mon livre, alors...
Amita (riant doucement) : Tu en as détesté chaque minute !
Charlie : Pas chaque minute. Hier, quand Larry et toi m'avez laissé pour travailler sur l'affaire, je me suis senti comme quand j'étais enfant et que... que je ratais l'école parce que j'étais malade.
Amita (soupirant) : Hmm ! J'adorerais rester à la maison. Les émissions de jeux, les feuilletons du matin, le bouillon de poule !
Charlie : Le bouillon de poule ? T'aimais ça ?
Amita : Oui, j'adorais !
Charlie rit.
Amita : Charlie, tu as travaillé quatre ans avec Don, alors c'est normal que ça te fasse un peu bizarre.
Charlie : Oui. Avant je voyais mon travail au F.B.I. comme une sorte de... de passe-temps, un simple détour sur la route qui allait me mener... à la grande destinée que tout le monde me prédisait depuis mes sept ans, quand on a su que j'étais doué. Et, je suppose que c'était un prétexte pour ne pas l'accomplir, cette destinée. Je n'aurais jamais cru que ça me manquerait à ce point là.
Amita se penche sur lui et lui dépose un baiser sur les lèvres.
Amita : Tu vas récupérer ton accréditation.
Charlie : Je sais oui.
Travelling arrière sur la chambre.
FIN DE L'EPISODE